Dans le contexte actuel de montée de la désinformation et des discours de haine, les populations centrafricaines sont particulièrement exposées à la manipulation. La cohésion sociale, le vivre ensemble et la paix, encore fragiles en RCA, en sont d’autant plus menacés. Avec un secteur médiatique encore faible et peu professionnalisé (particulièrement en province), les défis de la lutte contre la désinformation sont bien réels.
Des rumeurs communautaires bien présentes
Les rumeurs, à Bangassou comme dans de nombreuses villes de province en RCA, se développent et se propagent rapidement dans les communautés. Lorsqu’elles touchent les femmes ou certains groupes minoritaires comme les peuples autochtones ou encore les personnes en situation de handicap, ces rumeurs peuvent être particulièrement dangereuses. Elles mettent en péril l’intégrité physique et parfois la vie des personnes qui en sont victimes.
Monsieur Abdoulaye Mahamat, chef du quartier Mamapika du 3ème arrondissement de Bangassou, cite aussi les conséquences désastreuses dans les familles et sur la cohésion sociale et le vivre ensemble : «ces discours fusent dans la ville de Bangassou. Ça amène des problèmes dans les couples. Ça entraine des problèmes entre les familles également et tout ça créé des troubles dans tout le quartier. » Lorsqu’il a vent d’une information qui semble fausse ou qu’on lui rapporte une rumeur, Monsieur Mahamat convoque les habitants de son quartier. « Je fais ces réunions pour donner les vraies informations. J’en profite pour attirer continuellement l’attention sur les risques de la désinformation. Il ne faut pas que les gens se laissent entrainer par les fausses nouvelles et les discours de haine.»
Pour lutter contre les rumeurs, un engagement multiforme de RNL et de ses radios communautaires partenaires
C’est pour lutter contre ce phénomène de rumeur et de désinformation que Martin Venissio et Batchiomba Joyce, agents de la Radio Mbari (une des deux radios communautaires émettant à Bangassou), ont suivi, avec dix autres agents de six radios partenaires de RNL, une formation sur le traitement radiophonique des rumeurs communautaires. Cette formation, proposée et animée par RNL, s’est déroulée à Bouar, en novembre 2022. « Maintenant, je sais ce que c’est la désinformation, le fact checking. Avec les techniques et outils de vérification que j’ai appris à utiliser, on va pouvoir créer une tranche de diffusion de désinfox ! » s’enthousiasme Joyce de retour à Bangassou.
L’équipe de la radio Mbari ainsi renforcée pourra aussi s’appuyer sur cinq relais communautaires, dont la mission sera de sensibiliser les communautés sur les causes et les conséquences de la désinformation et des rumeurs et de partager les bases de l’éducation aux médias. Chancéline, Daniel A., Daniel M., Kevin et Valdicia ont conscience de l’importance de leur rôle à Bangassou « On a trop souffert de ce fléau et ça bloque le développement de notre pays » partage Valdicia, appuyée par Chancéline et Daniel A. qui sont prêts à « s’investir pour chasser ses rumeurs de la ville ».
A propos de la Radio Ndeke Luka
Créée en 2000 par la Fondation Hirondelle, Radio Ndeke Luka bénéficie du financement du Fonds Békou, fonds multi bailleur de l’Union européenne visant à soutenir la résilience de la République centrafricaine. Grâce à cet appui, Radio Ndeke Luka produit et diffuse une information fiable, indépendante et adaptée aux besoins en traitant des sujets de proximité, en français et en langue nationale (le Sango) grâce à 13 émetteurs relais répartis sur l’étendue du territoire. Depuis 2021, Radio Ndeke Luka s’est aussi dotée d’une cellule d’investigation « Stop Atènè » (stop aux rumeurs) et mets en œuvre des activités de sensibilisation et d’éducation aux médias à travers le territoire. Ce projet est financé par l’ICSP, l’Instrument contribuant à la stabilité et à la paix de l’Union européenne.